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Furyo , un film anglo-japonais de Nagisa Oshima, 1983

 

Distribution:

  • David Bowie : Jack "Strafer" Celliers
  • Tom Conti : John Lawrence
  • Ryuichi Sakamoto : Yonoi
  • Takeshi Kitano : Gengo Hara
  • Jack Thompson : Hicksley
  • Johnny Okura : Kanemoto
  • Alistair Browning : De Jong

Fiche technique:

  • Titre original : Senjou no Merii Kurisumasu
    titre US: Merry Christmas Mr. Lawrence
  • Réalisation :Nagisa Oshima
  • Scénario : Paul Mayersberg
    Nagisa Oshima d'après la nouvelle
    A Bar of shadow, extraite du recueil
    The Seed and the sower
    de Laurens Van Der Post.
  • Musique : Ryuichi Sakamoto
  • Images : Hideo Ito
  • Date de sortie : 1983
  • Production : Jeremy Thomas (GB)
  • Durée : 124 minutes
  • Genre : drame de guerre

Le film se déroule pendant la seconde guerre mondiale, à Java, dans un camp de prisonniers. Des soldats anglais sont détenus par des soldats japonais. Le capitaine Yonoï dirige le camp, secondé par le sergent Gengo Hara .
Le colonel John Lawrence , anglais bilingue, joue l'intermédiaire entre les japonais et les anglais.
Un premier incident ébranle la routine du camp lorsqu'un garde coréen ayant eu des relations sexuelles avec un prisonnier hollandais se fait hara-kiri.
Yonoi suspend la cérémonie funéraire pour assister au procès d'un officier, le troublant Major Jack Celliers, pour lequel il voue une troublante passion. Assistant au jugement du Major , le capitaine Yonoï lui permet d'échapper à la peine de mort et de rester prisonnier au camp. A parti de là, se nouent des jeux d'oppositions et d'attirances, des histoires d'amour homosexuelles et d'interdit.

Le film se situe où s'établissent les codes de la guerre, entre honneur du code et tabou. Une des premières discussions qui a lieu entre le sergent Hara et Lawrence à propos de l'homosexualité entre le coréen et l'hollandais montre le fossé entre japonais et anglais. - Hara : " Vous avez tous peur des pédés. Un samouraï n'en a pas peur ! " - Lawrence : " La guerre renforce l'amitié entre les hommes. Mais tous les soldats ne deviennent pas pédés. " - Hara : " Vous n'êtes que des prisonniers. Pas des soldats. Vous n'avez aucune discipline. C'est pour ça que vous m'implorez. C'est honteux. "

Lawrence représente le personnage qui semble comprendre les japonais. C'est ce que ceux-ci lui laisse croire jusqu'à ce qu'il ne saisisse plus leur comportement.
Quand Lawrence va voir Yonoï qui s'entraîne au sabre pour lui demander d'arrêter son entraînement qui gène les malades , au moment où Lawrence et Yonoï semblent s'accorder par une discussion sur des souvenirs communs au Japon, le passé de Yonoï ressurgit avec ses devoirs.
Il prépare aussitôt l'exécution du soldat coréen. Et la rupture s'établit lorsque, devant l'autel où Hara officie au rite funéraire du soldat qui s'est suicidé de n'avoir pas pu tuer Celliers, Yonoï expose le jeu de mort et de vie qui s'établit sur l'ordre du crime à la punition, accusant Lawrence de l'introduction de la radio dans le camp .
Lawrence est donc le personnage qui possède le plus de compassion envers les japonais et qui cherche à les rejoindre, si ce n'est dans leur logique, au moins les retrouver sur un plan humain. Ce que Lawrence n'attend plus se passe lorsque Hara, saoul, libère Lawrence et Jack et leur souhaite un joyeux noël. Moment d'échange, quand l'alcool libère des inhibitions.
Mais, là où la relation s'arrête entre le sergent Hara et Lawrence, Celliers va plus loin dans sa relation avec Yonoï. Si Lawrence s'arrête aux codes de l'amitié, Celliers dépasse la raison pour accéder à l'amour.

Apogée de la relation ambigu entre Celliers et Yonoï, lorsque le capitaine va trancher la tête de l'officier qui dirige le groupe d'évadés anglais, Jack s'avance vers Yonoï dans un instant où le temps semble s'être arrêté. Il l'agrippe et l'embrasse sur les deux joues. Images saccadées, mouvement fraternel et plus, message d'adieu et d'amour. A partir de là, le film rassemble les pardons des personnages qui gravitent autour de Jack. Il retrouve son frère en rêve qui l'excuse. Yonoï revient de nuit chercher une touffe de cheveux pour le commérer sur son autel. Tout un processus respectueux, où chaque personnage appose ses mouvements dans un temps d'observation de l'autre.

La fin du film se place quatre ans plus tard. La guerre est finie et Lawrence rend visite au sergent Hara en prison, toujours à Java. Ici, les rôles s'inversent, et la compassion de Lawrence n'a fait qu'augmenter.
Deux répliques résument bien le choc des cultures.
Au début du film, Hara dit à Lawrence prisonnier: 'Je vous admirerais plus si vous vous suicidiez. Comment un officier de votre rang peut-il supporter d'avoir été capturé?'
En 1946, quand les rôles sont inversés, Lauwrence lui répond: 'Vous êtes maintenant victime d'hommes qui sont certains d'avoir raison, avec une certitude aussi absolue que la vôtre jadis.'

Oshima a fait des choix surprenants mais très efficace pour ses acteurs.
Lawrence est interprété par Tom Conti, un acteur de théâtre qui a notamment joué dans Les Duellistes de Ridley Scott.
Hara, personnage à la fois jovial et cruel, qui symbolise le peuple, par Takeshi Kitano, aujourd'hui acteur et réalisateur bien connu, mais à l'époque comique populaire seulement au Japon.
Yonoï est un samouraï. Pour l'incarner, Oshima a choisi Ryuichi Sakamoto, du Yellow Magic Ochestra, qui débute au cinéma. Il est aussi l'auteur de la magnifique et hiératique bande-son , que Bowie a refusé de composer pour pouvoir être totalement crédible en tant qu'acteur.
Bowie, depuis toujours fasciné par le Japon, donne donc la réplique à une sorte d'alter ego nippon. Bowie et Sakamoto, deux visages, l'un occidental, l'autre oriental, d'une même identité artitisque, celle de la scène pop, jointe à une même singularité, celle d'une recherche visuelle menée en parallèle d'une recherche musicale.

Le tournage s'est déroulé à Rarotonga, dans les îles Cook. Le scénario est tiré d'une nouvelle de Laurens Van Der Post, auteur britannique qui fut prisonnier de guerre pendant quatre ans dans un camp japonais.

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