Le film se passe à la fin du XVIe siècle; à cette époque,
le Japon est déchiré par les guerres intérieures.
Dans la région d'Omi, sur les bords du lac Biwa, un potier, Genjuro, vit
pauvrement, sous la menace des hordes de l'armée Shibata. Ce soir-là,
la fournée a été bonne; il décide d'aller à la ville, en compagnie
de son beau-frère, Tobei vendre le produit de son artisanat.
Miyagi, son épouse, restée seule avec son fils, doit faire face aux mercenaires
: elle est tuée d'un coup de lance, mais l'enfant est indemne. Pendant
ce temps, les hommes tirent un bon prix des poteries. Tobei va pouvoir
réaliser son rêve : acheter une coûteuse armure de samouraï, au désespoir
de sa femme, Ohama, qui tente de le raisonner et le perd dans la foule.
Tandis qu'il joue les foudres de guerre, elle tombe entre les mains de
soudards. Quant à Genjuro, il est la proie d'un autre maléfice. Une séduisante
princesse, Wakasa, l'entraîne dans sa luxueuse résidence, à l'écart de
la cité, et le subjugue par ses charmes.
Il goûte des joies édéniques, avant de réaliser qu'il a été le jouet d'une
illusion.
La riche demeure où il croit avoir été reçu est en ruine depuis des années:
Wakasa était un fantôme.
Un prêtre rompt le sortilège, mais le potier se retrouve finalement dépouillé
de son bien. Il rentre tristement au village, où il trouve sa femme qui
l'attend et lui pardonne.
Son fils le rejoint et se couche à ses côtés. Au réveil, il s'apercevra
que ce bonheur retrouvé aussi est un leurre : Miyagi est morte, son fils
fleurit pieusement sa tombe. Genjuro continuera à actionner le tour, tandis
que Tobei, lui aussi de retour au pays, ayant récupéré Ohama dans un bouge,
jette à la rivière ses armes de samouraï, symbole de toutes les vanités.
Ce film est d'un raffinement extrême, à la beauté tour à tour altière
et éthérée, conjuguant en un même mouvement l'épopée et l'élégie, l'art
de la fresque et l'art de la fugue. Les Contes de la lune vague
peut être regardé comme un point limite de l'art de l'écran, qui transcende
le clivage des genres, des lieux, des époques, et touche d'emblée à l'universel.
Et pourtant, dans son pays d'origine, le film ne fut qu'un demi-succès.
Son réalisateur lui-même s'en déclarait insatisfait. Quand il le tourne,
Kenji Mizoguchi (1898-1956) a déja plus de soixante-dix films à
son actif, dont une infime partie a été vue en Europe.
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