Le Mariage de Verida ( Il Corpo della Sposa) , film italien de Michela Occhipinti , sorti en 2019 |
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Distribution:
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Fiche technique:
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Verida est une jeune fille moderne. Elle travaille dans un salon de beauté à Nouakchott, capitale de la Mauritanie, elle aime sortir avec ses amies. Elle apprend qu’elle a été promise à un homme sans qu’on lui demande son avis. Elle doit démarrer le rite du « gavage » afin de prendre la vingtaine de kilos supposés lui manquer. « Elle sera comme tu veux », promet-on au futur époux qui rend visite aux parents. Verida va, chaque jour, ingurgiter des plats préparés spécialement par sa mère, se peser, mais petit à petit, elle va aussi se rebeller contre la tradition. A l’époque de la grand-mère de Verida, la jeune épouse devait dévorer un animal entier durant sa nuit de noces. Le titre international du film, Flesh Out, plus percutant que le titre français, évoque l’ étouffement ou l’ épaississement de la chair que la pratique entraîne. L’apparition de vergetures et le craquement des tissus sont considérés comme les signes ultimes de la beauté. La réalisatrice a pris du temps pour enquêter sur cette coutume peu représentée au cinéma, et toujours en cours en Mauritanie. Dans ce premier long-métrage très documenté, sous la forme d’une fiction, la comédienne principale, non professionnelle, Verida Beitta Ahmed Deiche, a elle-même pratiqué le gavage. La coutume est décrite avec précision : les noces approchant, le rythme des repas s’intensifie (jusqu’à dix par jour), un mélange de viande, de féculents, de laitages, toujours joliment présentés. Une surabondance de nourriture pour le bien de la future mariée, lui dit-on, qui dispose de plusieurs semaines pour ingurgiter cette grande bouffe. Le gavage est d’abord une épreuve physique. Des femmes y ont laissé leur vie, d’autres se procurent sur le marché des pilules qui font grossir, au risque de développer des problèmes cardiaques. De toute façon, rien de tout cela n’est bon pour leur santé. Certaines ont l’air de bien vivre ce rituel, se regroupant lors de jours de fête pour s’éclater la panse entre filles. L’intérêt du film réside dans sa belle image et sur le point de vue ouvert et nuancé de Michela Occhipinti. Plutôt que de filmer à la campagne, et de donner le sentiment que le gavage est le fruit d’une histoire ancienne en voie de déshérence, elle a posé sa caméra dans une grande ville où Verida jouit d’une certaine autonomie. Avec son foulard et sa grande tunique qui cache ses formes, elle travaille dans un salon d’esthétique et partage des moments d’insouciance avec ses deux meilleures amies, une jeune femme noire à l’état d’esprit que l’on dirait occidental, et une étudiante en foulard qui rêve de partir au Caire et tente de réveiller la colère de Verida. Entre consternation et fatalisme, elle observe, médusée, le destin de son amie. Par cette multitude de regards, la cinéaste pose la question de la liberté des femmes s’agissant de leur corps, sans tomber dans le relativisme culturel ni mettre à égalité les comportements, minceur et régime pour les unes, gavage pour les autres, blanchiment de la peau en option pour les Noires et les Métisses. Cette fiction féministe a l’intelligence de ne pas emprunter le chemin tout tracé de la libération vue selon un regard occidental. « L’emploi d’acteurs non professionnels et la sobriété du travail de l’image participent du style discrètement observateur de ce film qui intègre le spectateur au cœur des vies qui lui sont montrées. La jeune actrice Verida Beitta Ahmed Deiche, au centre de chaque scène, incarne avec talent son personnage, et provoque notre empathie tandis que nous assistons à la lente libération des chaînes qui l’oppressent. Chacun de ses petits actes de désobéissance témoigne alors d’un processus par lequel elle commence à penser et à agir pour elle-même. » |
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