Suzanne film français de Katell Quillévéré, sorti en 2013 |
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Distribution:
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Fiche technique:
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Enfant, Suzanne danse sur scène parmi d'autres fillettes et rayonne de fierté sous le regard de son père, Nicolas, et sa jeune soeur, Maria. Chauffeur routier, veuf, Nicolas se consacre à ses filles qu'il préfère élever seul. Il renonce volontairement à refaire sa vie avec une autre femme. Lycéenne, Suzanne, tombe enceinte et décide de garder son enfant, bravant l'incompréhension de son père. Le petit Charly grandit. Entre Suzanne et Maria, la complicité reste très forte, même si Maria mûrit davantage. Sur un champ de course, Suzanne rencontre Julien, un mauvais garçon séduisant. L'amour qui les unit est si profond que Suzanne s'enfuit, abandonnant Charly. Nicolas et Maria ne la revoient, deux ans plus tard, que dans le prétoire d'un tribunal. Mais sa passion pour Julien, le malfrat à la belle gueule sera plus fort et va l'entrainer dans une délinquance encore plus dure, jusqu'à qu'un nouveau drame lui fasse définitivement prendre conscience des vraies valeurs. L'intensité du deuxième long métrage de Katell Quillévéré (après Un poison violent) tient beaucoup à tout ce qu'il élude. Sur le quart de siècle couvert par l'histoire, des périodes de plusieurs années sont laissées en blanc, ou plutôt dans le noir des courtes séquences qui marquent les changements d'époques. Certains événements cruciaux, sont escamotés, au tribunal, par exemple on entend seulement le réquisitoire du procureur, mais pas le jugement. Les cavales, la violence et les délits ne sont pas filmés. Leurs conséquences sur les visages et sur les sentiments, oui. Après chaque ellipse, on découvre une nouvelle donne, on retrouve Suzanne confrontée un peu plus à son destin, assumant des choix incompréhensibles pour son entourage. Le hors-champ tient une place prépondérante dans le film. Ce parti pris, que l'on retrouve à la fois dans l'écriture et dans le montage, place le spectateur dans la position finalement assez peu habituelle d'être en quelque sorte le coscénariste de cette histoire. A lui, en fonction de sa propre vie, de sa propre expérience, d'imaginer les pages volontairement laissées vieges par Katell Quillévéré. Suzanne n'est jamais aussi présente que lorsqu'elle n'est pas là, en cavale, en prison ou à l'Étranger. Katell Quillévéré filme les proches désarmés, incomplets, dévastés par le manque. Le père routier laisse la photo de sa fille à un jeune auto-stoppeur dont l'errance lui rappelle cruellement Suzanne. La petite soeur ouvrière croit voir la fugitive au fond d'une boîte de nuit dans un flash stroboscopique. Cette façon qu'a la cinéaste de s'attacher à ceux qui restent devient un point de vue lumineux sur la famille : c'est la trajectoire d'une seule qui rythme et façonne l'existence des autres. Suzanne vit. Les siens ne font que réagir et s'adapter tant bien que mal. Ce film émouvant et attachant doit beaucoup à ses acteurs. Sara Forestier et Adèle Haenel sont les deux sœurs, deux actrices lumineuses et intenses. Une fois de plus, Sara Forestier, dans ce rôle de femme éperdument amoureuse et de mère célibataire à la dérive, elle fait preuve d'une incroyable maturité émotionnelle. Moins connue, Adèle Haenel ( vue dans L'Apollonide : souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello, 2010) illumine le film de sa générosité. Aux côtés de François Damiens, épatant en père célibataire, toutes les deux constituent l'un des plus émouvants « couples » de sœurs que l'on ait vus depuis longtemps. On entend Suzanne, la chanson de Leonard Cohen (magnifiquement interprétée par Nina Simone), on écoute les paroles et on comprend ce qui a pu pousser Katell Quillévéré à écrire ce film : « Et tu veux voyager avec lui/Et tu veux voyager les yeux fermés/Et tu penses que peut-être tu lui feras confiance/Car il a touché ton corps parfait avec son esprit… » On pense bien sûr aussi à A nos amours, le chef-d'œuvre de Maurice Pialat, et à Sandrine Bonnaire qui s'appelle, elle aussi, Suzanne dans le film. Dans les deux histoires, une jeune fille essaye d'échapper à l'amour trop fort de son père. Katell QuillévéréKatell Quillévéré est née le 30 janvier 1980 à Abidjan, réalisatrice, scénariste et chef costumière française. Katell Quillévéré suit des études de cinéma et de philosophie à Paris. Après quelques court-métrages remarqués, elle réalise un premier long-métrage, Un poison violent, avec Lio dans un des rôles principaux. La jeune cinéaste sort son deuxième film en 2013, Suzanne Filmographie comme réalisatrice
Nominations et récompenses
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