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Par effraction
film anglo-américain d'Anthony Minghella, sorti en 2006

Distribution:

  • Jude Law (VF : Xavier Fagnon) : Will
  • Juliette Binoche : Amira
  • Robin Wright Penn (VF : Michèle Buzynski) : Liv
  • Martin Freeman (VF : Rémi Bichet) : Sandy
  • Vera Farmiga (VF : Larissa Cholomova) : Oana
  • Ray Winstone (VF : Bernard-Pierre Donnadieu) : Bruno
  • Mark Benton (VF : François Dunoyer) : Legge
  • Caroline Chikezie (VF : Annie Milon) : Erika
  • Emma Buckley (VF : Marjorie Frantz) : l'agent de police Erin Carter
  • Rafi Gavron (VF : Alexis Tomassian) : Miro
  • Rad Lazar (VF : Sacha Vikouloff) : Dragan
  • Eleanor Matsuura (VF : Margot Faure) : Ruby
  • Poppy Rogers (VF : Lutèce Ragueneau) : Beatrice
  • Juliet Stevenson (VF : Manoëlle Gaillard) : Rosemary
  • Velibor Topic (VF : Bogdan Staonevitch) : Vlado
  • Ed Westwick (VF : Donald Reignoux) : Zoran

Fiche technique:

  • Titre original : Breaking and Entering
  • Réalisateur : Anthony Minghella
  • Scénariste : Anthony Minghella
  • Producteurs : Tim Bricknell, Anthony Minghella, Sydney Pollack et Colin Vaines
  • Musique originale : Karl Hyde, Rick Smith (duo formant d'ailleurs le groupe de techno Underworld) et Gabriel Yared
  • Directeur de la photographie : Benoît Delhomme
  • Film britannique, et américain
  • Durée : 119 minutes
  • Dates de sortie :
    • Canada : 13 septembre 2006
    • États-Unis : 9 novembre 2006
    • France : 14 mars 2007
  • 3 nominations aux Oscars

Fiche IMDB

Will traverse une période difficile avec Liv, sa compagne. Il vient en plus d'installer son cabinet d'architecte paysagiste dans King's Cross, un quartier de Londres en pleine réhabilitation. Ses luxueux locaux attirent une bande du coin qui le cambriole à répétition.

Excédés par la situation, Will et Sandy décident de passer leurs nuits dans une voiture, devant leur agence, pour prendre les coupables sur le fait. Une nuit, Will voit un jeune homme entrer par le toit de son agence. Il parvient à suivre ce dernier jusqu’à chez lui à son insu, et découvre avec surprise qu’il l’a déjà rencontré par hasard près d’un centre de sport, accompagné de sa mère. Le jeune homme, Miro, est un mineur en échec scolaire qui a quitté Sarajevo avec sa mère, musulmane, mais sans son père, serbe, pendant la guerre en Bosnie. Sa mère Amira gagne difficilement sa vie comme couturière.

Sans lui dire ce qu’il sait et peut-être sans trop savoir ce qu’il veut, Will cherche à se lier à Amira en prétextant le besoin de réparer un vêtement. Amira et son fils vivent dans Alexandra Road Estate, un quartier dense composé de terrasses créé dans les années 1970 par l’architecte Neave Brown.

Il y a beaucoup de thèmes intéressants dans le film. Certains sont assez mal traités, comme tout ce qui est relatif à la maladie de la belle-fille de Will, dont le syndrome vaguement autistique n’est pas bien scénarisé et encore moins interprété, ou comme la question du déracinement, de l’immigration et de la différence culturelle.

Juliette Binoche est plutôt bonne dans son rôle, pas toujours facile. Se rendre compte qu’on ne parvient pas à parler de la guerre et des cicatrices qu’on en a gardé au milieu d’un supermarché londonien ; ne pas savoir exactement si on fait quelque chose pour une raison égoïste et intéressée, par désespoir ou par amour procure de bonnes scènes.

Quelques autres personnages sont très réussis, comme le policier qui traque Miro avec bienveillance et fatalisme, ou la prostituée Oana qui tient compagnie à Will lors de ses moments de surveillance : elle s’impose, parce qu’elle est contente de trouver une voiture où se réchauffer entre deux passes. Enfin, Miro, le fils d’Amira, a une certaine épaisseur et malgré son attitude taciturne, on n’a pas tellement de mal à suivre le fil de ses pensées.

Modernité oblige, le MacBook de Will est sans doute l’objet le plus important du récit. Le scénario donne en effet une grande importance aux données numériques : l’ordinateur volé, qui selon Will contient « toute sa vie », photos et vidéos familiales, aurait dû être purgé de son contenu par Miro mais ce dernier ne parvient pas à s’y résoudre. Lors du second cambriolage, il fait même une sorte de cadeau à Will : il laisse un CD-rom contenant une sauvegarde des photographies qui avaient disparu avec la machine. Les images de la vie de famille de Will ne sont rien pour Miro et il ne s’attarde pas énormément à les regarder, mais il en comprend la valeur, qu’il juge apparemment bien plus importante que celle des luxueux ordinateur qu’il dérobe.

Le thème le plus intéressant du film est sans doute celui de l’urbanisme. Aux architectes Will et Sandy qui sont animés par le souci sincère mais peut-être aussi légèrement condescendant d’améliorer l’existence d’un quartier s’opposent Miro et ses amis, qui pratiquent le Parkour, cet « art du déplacement » urbain qui est une autre manière de s’approprier la ville et d’en redessiner les couloirs, les accès, les flux. Les deux approches s’opposent, mais elles se rejoignent en ce sens que Miro comme Will voient la ville du dessus, le premier en sautant de toit en toit, et le second en la réduisant à l’état de maquette. Miro vit et survit, tandis que Will semble tout placer sur un plan abstrait et maîtrisé : il apporte des espaces verts encadrés dans le quartier qu’il aménage et il se vante de conduire un véhicule écologique mais il supporte difficilement l’unique élément naturel de son voisinage, un renard.

Un autre motif revient souvent : celui de la prise de vues. Il y a la photo de la femme de ménage Erika que son patron Sandy conserve parce qu’il est amoureux (fonction vaudou) ; il y a les photographies et les vidéos de famille de Will, « toute sa vie », qui seront aussi pour Amira la preuve qu’il n’est pas entré dans sa vie par hasard ; il y a les photographies que l’amie d’Amira prend, à la demande de cette dernière, de Will et d’elle dans son lit, avec pour projet de faire chanter ce dernier ; enfin, c’est en utilisant son caméscope que Miro comprend que Will est venu chez lui.

Ce film est passionnant pour un spectateur attentif, tant il contient de détails signifiants, de métaphores, de parallèles ou d’oppositions, même s'il n’y reste plus beaucoup de place pour sa rêverie ou son interprétation personnelle.

 

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