Le Nom de la Rose, un film français de Jean-Jacques Annaud , sorti en 1986 |
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Distribution:
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Fiche technique:
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En 1327, alors que la chrétienté est divisée entre l'autorité du pape Jean XXII et celle de l'Empereur Louis IV du Saint-Empire, l'ex-inquisiteur Guillaume de Baskerville se rend dans une abbaye bénédictine, située entre Provence et Ligurie, accompagné par son novice Adso. Dans un climat de conflit théologique entre les franciscains et l'autorité pontificale au sujet de la pauvreté du Christ, servant avant tout de façade au conflit politique entre le pape et l'empereur, l'ancien inquisiteur doit reprendre sa charge à la demande de l'abbé, à la suite de la mort suspecte d'un des moines. Rapidement, ce que beaucoup semblaient considérer comme un suicide prend des allures de plus en plus inquiétantes. Lorsque l'inquisiteur dominicain Bernardo Gui se rend à l'abbaye à la demande du pape, et commence à se mêler à l'enquête, cela est loin d'arranger les choses. Au-delà de l'enquête policière, on peut retenir de ce roman le combat d'un homme contre l'obscurantisme, un plaidoyer pour la liberté et le savoir. Dans le générique d'ouverture, le film se présente explicitement comme un palimpseste du roman, c'est-à-dire qu'il ne prétend pas à une exacte fidélité mais qu'il est une œuvre dont il partage le même support. Son contenu est néanmoins très fidèle au roman. Un clin d'œil est fait à Umberto Eco, lorsque Guillaume de Baskerville dans la bibliothèque s'extasie sur un ouvrage de "Umberto de Bologne" (ville où Umberto Eco est professeur). Situé au cœur d’une période agitée où la sainte Inquisition ne savait plus où donner du bûcher, le récit se développe sur un rythme de plus en plus soutenu avec comme toile de fond une forte opposition entre raison et surnaturel mettant bien entendu certaines exactions sur la sellette. Comme le dit le héros, « il n’y a qu’un pas entre vision extatique et frénésie de péchés. » Le film est bâti comme l'illusion de l'escalier sans fin de Roger Penrose (ou d'Escher), escalier où aura lieu d'ailleurs le combat dans l'incendie entre le « bon » moine franciscain Guillaume de Baskerville, par ailleurs ancien inquisiteur, et l'un des « méchants », ex-bibliothécaire de l'abbaye, Jorge de Burgos (autre clin d'oeil, d'U. Eco cette fois, à Jorge Luis Borges et à sa nouvelle La Bibliothèque de Babel). La religion est régulièrement mise en défaut et la majorité des moines sont des illuminés. Seuls les personnages de Sean Connery et Christian Slater semblent réellement s’interroger sur la foi et l’amour de Dieu. La délégation papale est composée de vieillards cupides farouchement opposés aux franciscains prônant une église pauvre. Tout livre considéré comme « suspect » est aussitôt enfermé à double tour dans une bibliothèque-forteresse pour éviter qu’un moinillon vienne à douter de l’infaillibilité de la parole divine. Le rire est ainsi éradiqué. Car le rire tue la peur, et sans peur pas de foi. Et surtout, sans foi, pas de Dieu. Comme dans Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, le monde médiéval est illustré avec le difforme (bossu), la jeune fille érotique, la religiosité, les paysans primaires et ici les copistes pour un livre païen. Jean-Jacques Annaud sollicita pour le film le producteur allemand Bernd Eichinger qui finança ce coûteux projet. Sean Connery insista lourdement afin d'obtenir le rôle principal de cette adaptation qui ne se fit pas sans difficultés : plusieurs scénaristes planchèrent sur ce difficile travail de transposition (le premier étant le scénariste attitré de Annaud Alain Godard). Le prestigieux chef opérateur italien Tonino Delli Colli (qui avait travaillé avec Pier Paolo Pasolini) signa les lumières, et le décorateur italien Dante Ferretti reconstruisit l'abbaye austère dans les Abruzzes, non loin de Rome. La musique de James Horner (le futur compositeur de la b.o. de Titanic) confère au film une ambiance à la fois belle, envoûtante et terrifiante sans être dénuée de mélancolie. Pour conclure, une leçon d'histoire et un thriller efficace, tant par son ambiance, que par sa qualité d’écriture, qui voit Guillaume de Baskerville échafauder patiemment sa théorie avant de voir débarquer son ennemi de toujours, Bernardo Guy, juste au moment où il allait exposer cette dernière. A noter également le travail remarquable de James Horner, en particulier une petite astuce jouant à nous faire entendre des sons dont l’origine ne nous est révélée que quelques longues secondes plus tard. |
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