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Longs Adieux , film soviétique de Kira Mouratova , sorti en 1971

Distribution:

  • Zinaida Charko : Yevgeniya Vasilyevna
  • Oleg Vladimirsky : Ustinov
  • Youri Kayourov : Nikuline

Fiche technique:

  • Réal Titre original : Долгие проводы, Dolguie provody
  • Réalisation : Kira Mouratova
  • Scénario : Natalia Riazantseva
  • Photographie : Guennadi Kariouk
  • Montage : Valentina Oleynik
  • Musique : Oleg Karavaïtchouk
  • Format : Noir et blanc - 35 mm
  • Durée : 97 minutes
  • Dates de sortie :
    • URSS : 1er août 1971 (sortie limitée puis censurée)
    • Suisse : août 1987 (Festival international du film de Locarno)
    • France : 16 mars 1988


Evguenia Vassilievna exerce le métier de traductrice. Son mari ayant depuis longtemps quitté le domicile pour se consacrer à ses travaux archéologiques, elle élève seule son fils, Sacha, maintenant adolescent. Mais Evguenia continue à le traiter comme un enfant. Il part passer un été avec son père dans le Caucase et est séduit par l’intelligence et le caractère de celui-ci. Quand il revient chez sa mère, il a changé et souhaite revenir vers son père

Mouratova s’intéresse aux relations flottantes et contradictoires entre une mère et son fils, à peine sorti de l’adolescence. la réalisatrice, à travers de longues séquences assez virtuoses, parvient à captiver le spectateur par la manière dont elle fait circuler ses personnages dans un espace à la fois réel et affectif. Une longue séquence au bord de la mer où se croisent, dans la première moitié du film, une kyrielle de personnages est sans doute le sommet du film, tant elle parvient à créer, avec une infinie subtilité un monde fugace et pourtant frappé d’une sorte d’éternité, par la seule force d’une mise en scène insaisissable.

Après une bréve sortie, ce film est censuré pendant 16 ans. Les conditions de production de l’époque, étroitement liées au système politique tout entier, n’étaient pas en mesure d’accueillir le monde de Mouratova. Rien de sciemment contestataire à l’égard du régime mais une farouche volonté de filmer les marges, femmes en exil intérieur, mendiants, dormeurs, indigènes, bouffons, jeunes vagabonds. Mouratova se range dès lors du côté de celles et ceux dont la vitalité serait pleine mais contrariée. Dans ce monde, rien n’est ainsi logique et cohérent.

Ce chaos, le film l’explore par un infini de trouvailles formelles, désynchronisation volontaire des voix, effets de répétition ou de rupture, jaillissement du passé dans le présent.

« Il n'y a pas plus de héros dans les films de Mouratova qu'il n'y a de Soviétiques. On est en Russie, un pays que le cinéma a cessé de filmer depuis des années. Et c'est justement parce que Kira Mouratova, dans son entêtement de cinéaste lunaire, ne s'est intéressée, pendant toutes ces années, qu'aux sentiments des habitants de l'Union soviétique qu'elle a réussi, en douce, en fraude, avec une obsession d'artiste amoureuse, à filmer à travers l'URSS ce qui reste encore et toujours de la Russie éternelle : ses habitants. »
Louis Skorecki


Kira Mouratova

Kira Gueorguievna Muratova est une réalisatrice, scénariste et actrice roumaine puis soviétique et enfin ukrainienne, née en 1934 à Soroca en Bessarabie roumaine et morte le 6 juin 2018 à Odessa (Ukraine).

Kira Mouratova est née le 5 novembre 1934 à Soroca dans la Bessarabie alors roumaine (actuellement en Moldavie) et soviétique à partir de 1940. Elle est diplômée du Institut fédéral d'État du Cinéma (VGIK) de Moscou en 1962 et se met à travailler pour le studio d'Odessa.

Après la réalisation d'un court métrage, son premier grand film, Brèves rencontres (Короткие встречи) en 1967, épinglant ouvertement la bureaucratie soviétique, est peu apprécié par la censure soviétique. Son film suivant, Longs Adieux (Долгие проводы) est lui censuré jusqu'en 1987.

Par la suite, l'activité créatrice de la réalisatrice sera partiellement bridée jusqu'au début de la Perestroïka, en 1986. Avec la ressortie de ses films précédemment censurés, en 1987, la popularité de Kira Mouratova grandit, en URSS, comme à l'étranger. Elle est ainsi membre du jury lors de la Mostra de Venise 1990.

Cette notoriété lui permettra de continuer à réaliser y compris pendant les années de crise succédant à la dislocation de l'Union soviétique. Elle signe alors certains de ses meilleurs films, comme Le Syndrome asthénique (Астенический синдром), primé au Festival de Berlin, 1990. En 1994, elle reçoit un Léopard d'honneur au Festival international du film de Locarno. À partir de 1997, elle participe pleinement au renouveau des cinémas russe et ukrainien.

Filmographie comme réalisatrice et scénariste

  • 1967 : Brèves Rencontres (Короткие встречи).
  • 1971 : Longs Adieux (Долгие проводы)
  • 1978 : En découvrant le vaste monde (Познавая Белый Свет)
  • 1983 : Parmi les pierres grises (Среди Серых Камней)
  • 1987 : Changement de destinée (Перемена участи)
  • 1989 : Le Syndrome asthénique (Астенический синдром).
  • 1992 : Le Milicien amoureux (Чувствительный милиционер)
  • 1994 : Les Petites passions (Увлеченья)
  • 1997 : Trois Histoires (Три истории)
  • 1999 : Lettre à l’Amérique (Письмо в Америку)
  • 2001 : Citoyens de deuxième classe (Второстепенные люди)
  • 2002 : Motifs tchékhoviens (Чеховские мотивы)
  • 2004 : L'Accordeur (Настройщик)
  • 2007 : Deux en un (Два в Одном)
  • 2008 : Mélodie pour pianoforte (Мелодия для шарманки)
  • 2012 : L'Éternel Retour (Вечное возвращение, Vetchnoe vozvrachtchenie)

Récompenses

  • Festival international du film de Locarno 1987 : Prix FIPRESCI pour Longs Adieux
  • Berlinale 1990 : Grand prix du jury pour Le Syndrome asthénique

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