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La Rafle , film français de Roselyne Bosch , sorti en 2010

Distribution:

  • Mélanie Laurent : Annette Monod
  • Jean Reno : Dr. David Sheinbaum
  • Gad Elmaleh : Schmuel Weismann
  • Raphaëlle Agogué : Sura Weismann
  • Hugo Leverdez : Joseph Weissman
  • Sylvie Testud : Bella Zygler
  • Anne Brochet : Dina Traube
  • Catherine Allégret : la concierge "Tati"
  • Isabelle Gélinas : Hélène Timonier
  • Rebecca Marder : Rachel Weismann
  • Barnabás Réti : Monsieur Goldstein
  • Udo Schenk : Adolf Hitler
  • Catherine Hosmalin : la boulangère
  • Thomas Darchinger : Heinrich Himmler
  • Holger Daemgen : Karl Oberg
  • Thierry Frémont : Capitaine Pierret
  • Denis Ménochet : L'adjudant du camp
  • Roland Copé : Philippe Pétain

Fiche technique:

  • Titre : La Rafle
  • Réalisation : Roselyne Bosch
  • Assistant réalisateur : Lucie Gratas, Nandi Kiss
  • Scénario : Roselyne Bosch
  • Photographie : David Ungaro
  • Montage : Yann Malcor
  • Conseiller technique Serge Klarsfeld, Joseph Weismann
  • Producteur : Alain Goldman
  • Production: Légende Films
  • Coproduction : Gaumont, France 3, TF1
  • Durée : 115 minutes
  • Date de sortie: 10 mars 2010
  • Fiche IMDB

Ce film évoque l'arrestation par des policiers français, le 16 juillet 1942 et la détention au Vélodrome d'Hiver, dans des conditions épouvantables, des treize mille cent cinquante-deux victimes de la rafle du Vél d'Hiv, avant leur déportation, au bout de quelques jours, vers le camp de transit de Beaune-la-Rolande (Loiret) puis le camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau. Ces déportés incluaient quatre mille cinquante-et-un enfants dont deux rares survivants Anna Traube et Joseph Weismann, qui purent en témoigner.

A l'origine du film “La Rafle”, il y a deux ans et demi de reportage et d'enquête : Rose Bosch a rassemblé des témoignages, écrits ou enregistrés, pour construire son récit et ses personnages. Elle est entrée en contact, avec l'aide de Serge Klarsfeld, avec trois témoins encore vivants : Fernand Bodevin, l’un des pompiers du Vel’d'Hiv’, Joseph Weismann et Anna Traube.

Elle a lu les lettres jetées sur les voies par les enfants déportés à Auschwitz, et visionné les « films de vacances » d'Eva Braun. Tous les faits et anecdotes du film sont véridiques, qu'ils soient directement liés ou non à la rafle et à la déportation. C'est par exemple le cas de Michel Muller, oublié devant l'école par son frère Jean, l’histoire ayant été attribuée dans le scénario à Nono et son frère Simon. Les souvenirs des témoins sont aussi à l'origine de certains choix de mise en scène : le plan serré sur les mains de Nono, qui refuse d'être enfermé dans le wagon à la fin du film, est la transcription visuelle d'une phrase d'Annette Leiris Monod qui se rappelle « quatre bouts de doigts » quand Jacquot crie « je veux descendre ».

Ce parti pris de «restituer ces gens à la vie» se retrouve dans l'élaboration des personnages : le travail d'enquête a aussi eu pour objectif d’identifier « quelques destins ».

La réalisatrice utilise deux dispositifs techniques. Les scènes « posées » de la vie quotidienne et celles à l'intérieur du Vel’d'Hiv’ sont filmées avec une caméra sur pied . Les scènes de violence sont filmées avec des caméras plus mobiles : la séparation des familles au camp de Beaune-La-Rolande est enregistrée par trois caméras, une à l'épaule et deux sur steadycam. Dans les plans de la rafle dans l'immeuble, le cadreur, caméra à l'épaule, se trouve au milieu des acteurs et figurants, bousculé par eux. Il s'agit d'être au cœur de l’action.

Le contexte historique:

En 1939, à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, la population juive en France compte environ 300 000 personnes. Celle-ci est diverse, aussi bien d’un point de vue sociologique que politique ou encore au regard des origines : les Juifs français en représentent alors 60%, dont 110 000 par filiation, et 70 000 par naturalisation; le nombre de juifs de nationalités étrangères, immigrés d’Europe centrale et orientale dans les dernières décennies, approche quant à lui les 120 000. Paris est le cœur de cette population juive avec près de 200 000 personnes, dont la localisation dans les quartiers reflète le niveau social et les origines géographiques. C’est ainsi que les quartiers ouest abritent les gens les plus aisés, tandis que les nouveaux arrivants, polonais, hongrois, roumains ou russes s’installent dans le Marais, le XIème arrondissement, Belleville ou dans une moindre mesure, Montmartre et le XVIIIème, depuis les années 1920.

Sur le plan social, environ les trois-quarts des Juifs, autochtones et immigrés confondus, se rattachent aux classes moyennes, de la plus aisée à la plus fragile : petits industriels, professions libérales, fonctionnaires, commerçants et artisans. Mais près de 25 000 Juifs, immigrés de date récente, vivent à Paris dans la pauvreté et parfois la misère. Plusieurs milliers, parmi eux, travaillent à façon dans la petite industrie du vêtement, du cuir, du meuble, souvent sans permis de travail, sans protection syndicale et sont sous-payés. Les vagues d’immigrés juifs des années 20 et 30 comportent un taux relativement élevé de militants politisés, répartis inégalement entre communistes et sionistes. La population ouvrière, réceptive aux messages de la gauche, compte un nombre de militants relativement faible. Toutefois, les cercles culturels et sportifs animés par les nombreuses associations de différentes tendances ainsi que les organisations politiques touchent un public nombreux. Si la pratique religieuse peut rester sensible chez une partie des immigrés, la majorité s’en éloigne de plus en plus, le judaïsme s’inscrivant davantage dans une sociabilité et une culture, notamment l’usage du yiddish. Pour les Juifs français, la religion apparaît au contraire comme un élément identitaire certain.

Les rafles d’hommes juifs en France, demandées par les allemands et réalisées en collaboration avec la police française, commencent à Paris en mai et août 1941, avant la décision des nazis, à l’automne, d’assassiner les Juifs d’Europe. Dirigée par Adolf Eichmann, la planification pour les trois pays occidentaux occupés par les nazis (France, Belgique et Pays-Bas) débute en juin 1942. Le 15 juin, alors que deux convois ont déjà quitté la France pour Auschwitz, le quota pour l’Hexagone est fixé à 40 000 personnes à déporter en 1942. Theodor Dannecker, représentant d’Adolf Eichmann, mène les négociations avec René Bousquet, Secrétaire Général à la police de l’État français : pour les Allemands, il s’agit d’obtenir la collaboration de la police française en zone occupée et la livraison par Vichy de Juifs de la zone libre. Le 2 juillet, un accord est entériné. 20 000 Juifs étrangers seront arrêtés en zone occupée, 10 000 autres en zone libre. En contrepartie, le gouvernement de Vichy obtient le contrôle de la police française. Le 3 juillet, Pétain et Laval donnent leur accord; le Président du Conseil déclare se désintéresser des enfants en zone occupée et propose aux allemands, qui ne l’avaient pas réclamé, la déportation des enfants dont les parents seront arrêtés en zone libre.

En zone occupée, les arrestations débutent dès le 13 juillet. Dans l’agglomération parisienne, la rafle du Vel’d’Hiv’, dite opération « Vent printanier », est réalisée les 16 et 17 juillet 1942 par des fonctionnaires de police français. 13152 Juifs, dont 4115 enfants, la plupart nés en France, sont arrêtés à leur domicile, sur la base du fichier élaboré par la Préfecture de Police. Gardiens de la paix, inspecteurs en civil, élèves des écoles de police, soit près de 7000 hommes, participent à la rafle qui concerne pour la première fois femmes et enfants. Les adultes seuls sont envoyés à Drancy ; les familles, soit 8160 personnes, sont parquées pendant 3 à 5 jours au Vel’ d’Hiv’, puis acheminées vers les camps du Loiret.

Les familles transférées du Vel’d’hiv’ entre les 19 et 22 juillet 1942 arrivent aux camps de Pithiviers et Beaune-La-Rolande, gérés par l’administration française. Les parents sont rapidement déportés alors que les allemands n’ont pas encore donné leur réponse quant au sort des enfants. Âgés de 2 à 15 ans, ceux-ci restent seuls durant plusieurs semaines. Désorientés par l’absence de leurs parents et vivant dans des baraques inadaptées à la présence d’enfants, ils connaissent des conditions d’hygiène catastrophiques. Huit meurent durant cette période. Le 13 août, le service d’Eichmann fait savoir que les enfants doivent également être déportés : ils sont alors transférés vers Drancy et, de là, embarqués dans les convois partant pour Auschwitz Les témoignages rapportant cet événement font état de scènes difficilement supportables.

 

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