Journal intime, un film italien de Nanni Moretti, sorti en 1994 |
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Distribution:
| ![]() | Fiche technique:
Récompense: Prix de la Mise en scène à Cannes 1994 | |
Le film se compose de trois épisodes: Le premier épisode, En Vespa, montre l'acteur dans sa promenade
en Vespa à travers les quartiers d'une Rome estivale et à moitié déserte,
interrogeant des passants. La photographie des beautés du paysage architectural
et monumental accompagne les réflexions du réalisateur qui passent de
la critique cinématographique en général et du cinéma hollywoodien en
particulier, à la sociologie et à la complexité urbanistique de tous ces
quartiers périphériques de la capitale. Sa plus grande joie, danser dans
un bal populaire. Dans le second épisode, Les Îles, Moretti est en voyage
dans les Îles Éoliennes, fuyant la frénésie de la vie citadine.
En visite sur l'île de Lipari chez son ami Gerardo où il s'est retiré
pour étudier, il ne réussit cependant pas à trouver la tranquillité tant
convoitée dans la confusion touristique. Les deux amis se rendent alors
sur l'île de Salina, où ils sont accueillis chez un couple d'amis de Gerardo,
lesquels se débattent avec l'éducation problématique de leur fils, un
enfant gâté et télédépendant. Gerardo, depuis toujours allergique à la
télévision se découvre étonnamment séduit, en particulier par les soap
opera. Sur l'île de Stromboli, le maire mégalomane voudrait les entraîner
dans des projets extravagants. Le dernier épisode, Les Médecins, raconte son odyssée, autobiographique et en partie filmée depuis la vie réelle, aux prises avec un lymphome de Hodgkin (tumeur du système lymphatique au pronostic plus favorable en regard du lymphome non Hodgkin), dont il ne s'est rendu compte qu'après une série d'avis discordants, consultations imprécises, soins inutiles et dispendieux. À partir du symptôme d'un prurit en évolution au point de perturber son sommeil, de transpiration et d'amaigrissement, il s'adresse en vain à plusieurs « lumières » de la dermatologie, obtenant seulement de continuelles prescriptions pharmaceutiques, de différents types de shampoings et enfin d'une cure dans une localité balnéaire. Après avoir risqué un choc anaphylactique à cause d'un vaccin qui se révélera inutile, il se tourne vers la médecine orientale. Un médecin acupuncteur lui conseille des contrôles radiographiques ; le scanner semble indiquer la présence d'un sarcome pulmonaire incurable ; l'intervention chirurgicale met cette fois en évidence un lymphome de Hodgkin pour lequel le réalisateur commence des séances de chimiothérapie. En consultant une encyclopédie médicale, Moretti trouve la confirmation de ce que les symptômes de cette maladie sont bien ceux dont il a souffert et dont il a toujours fait état en anamnèse. Déçu (« les médecins savent parler mais pas écouter », l'épisode, raconté à la table d'un bar remplie des produits achetés, se conclut par un amer et sarcastique brindisi avec un verre d'eau avalé l'estomac vide (« ils disent que ça fait du bien »). Nanni Moretti (né en 1953) se situe à la gauche de l'échiquier politique italien : « je suis de gauche et ce qui m'intéresse, c'est d'ironiser sur la gauche, de la critiquer, de la stigmatiser. » Après l'accession de Silvio Berlusconi au pouvoir, Moretti s'affirmera comme l'un des maîtres à penser d'une gauche en panne de projet. Journal intime, insolite et charmeur, grave et primesautier, est à l'image de son auteur qui y délivre, avec le sourire, un message dans le droit fil des idées qu'il défend depuis toujours : " Je ne veux plus hurler contre les autres, je ne suis pas résigné, j'ai compris qu'ils sont comme ils décident d'être et non pas comme je désire qu'ils soient" Ce film arrive à être à la fois
très égocentrique et très généreux. Nanni Moretti ne parle dans ces trois chapitres
de son "Journal intime" que d'une seule chose : lui-même. C'est aussi un formidable étalage de personnages plus drôles les uns que les autres : Moretti, lui-même, chevauchant sa Vespa à travers les différents quartiers de Rome la belle, dansant au milieu d'une fête ou dans une trattoria, s'arrêtant pour aller au cinéma, visiter une maison sous un prétexte fallacieux, le repérage pour une comédie musicale sur un pâtissier trotskiste dans l'Italie des années 30, abordant un automobiliste pour lui asséner une vérité ou Jennifer Beals pour s'extasier sur la commodité de ses chaussures et passer pour un fou. Moretti
encore, allant d'île en île à la recherche d'un lieu où créer, errant de médecin
en médecin pour trouver un remède à ce mal qui le ronge. Et enfin il y a ce regard du dernier plan, où l'auteur/acteur nous regarde droit dans les yeux, comme pour nous dire : "et toi, qui est tu ?" ce film est soutenu et traversé par une bande-son extraordinaire par la qualité et l'éclectisme de sa musique de Nicola Piovani, Khaled, Keith Jarret, ... Ces réflexions intimes s'adressent au plus grand nombre, dans un langage simple, pour témoigner, au-delà du particulier, d'un malaise général. Pour se moquer du conformisme , fut-il de gauche et dénoncer l'arrogance des médecins qui ne savent pas écouter leurs patients. |
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