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« La vie se comporte parfois comme si elle avait vu trop de mauvais films. De ceux qui finissent trop à propos, trop nettement… quand tout s’arrange trop bien. Tel était le début, tel sera la fin : la fermeture en fondu identique à l’ouverture… Lorsque j’ai ouvert en fondu, la comtesse n’était pas comtesse. Ce n’était même pas une vedette nommée Maria d’Amata. Oui, quand j’ai ouvert en fondu, elle s’appelait Maria Vargas, et elle dansait dans un night-club de Madrid. » C’est par ces phrases énoncées par la voix rauque d’Humphrey Bogart que s’ouvre le film considéré comme un des chefs-d’œuvre de Joseph L. Mankiewicz, La Comtesse aux pieds nus, il y est à la fois le metteur en scène, le scénariste et le producteur. Lors de l'enterrement de Maria Vargas, Harry Dawes,metteur en scène à Hollywood voit défiler toute la vie de la défunte à partir du jour où il a fait sa connaissance. Par une série de flashbacks, nous assistons ainsi à la découverte de Maria alors danseuse dans un night-club de Madrid par le producteur Kirk Edwards et son équipe. D'abord réticente à l'idée de faire du cinéma, Maria se laisse finalement convaincre par Harry. Nouveaux flashbacks : Maria est maintenant une star hollywoodienne qui a pris le nom de "d'Amata". Encensée par le public, la jeune femme n'est pourtant pas heureuse et ne se sent guère à sa place. Elle retourne à Madrid pour défendre son père accusé d'avoir tué sa mère et victorieuse revient à Hollywood. Plus tard, courtisée par un milliardaire sud-américain Alberto Bravano, Maria quitte Kirk Edwards qui a exercé son autorité sur elle et part en croisière, l'ex-agent de presse de Kirk, Oscar Muldoon les accompagne. Oscar prend alors la parole dans le cimetière pour narrer leur voyage. Une querelle oppose Bravano à Maria dans un casino et la jeune femme le quitte en compagnie de son défenseur le comte Torlato-Favrini. Le comte prend en charge le récit et décrit l'idylle qui le noue bientôt à Maria, malgré la désapprobation de sa sœur aînée seule consciente qu'il n'est pas un homme comme les autres. Le mariage a lieu et le rêve de Maria semble se réaliser lorsqu'elle apprend la terrible vérité : blessé pendant la guerre, son mari est impuissant. C'est Harry qui raconte la fin de l'histoire : quelques mois après sa lune de miel, Maria revient se confier à son ami. Elle lui apprend qu'elle est enceinte d'un domestique et va l'avouer à son mari le soir même. Mais lorsque Harry inquiet arrive chez eux, le comte a tué Maria et son amant. A la fin de la cérémonie, Harry rentre chez lui : il aura « une bonne journée de travail » le lendemain. En 1954, Mankiewicz s’affranchit de la tutelle des grands studios et fonde sa propre maison de production « Figaro Inc. », La Comtesse aux pieds nus sera la première production de Mankiewicz. Dés que cette œuvre fut en projet, des rumeurs coururent les milieux cinématographiques, vantant l’audace du sujet et prévoyant que le film ferait scandale. On disait que le nouveau scénario de Mankiewicz était basé sur des éléments autobiographiques de la vie de Rita Hayworth : les origines espagnoles, les débuts dans la danse et les changements de « look », ainsi que les similitudes de personnages entre Kirk Edwards et Harry Cohn, le directeur de la Columbia dont Rita Hayworth était la star, entre Alberto Bravano et Eddy Judson le premier mari de l’actrice, entre le comte Torlato-Favrini et le Prince Aly Khan le second mari de Rita, entre Oscar Muldoon et Johnny Meyer, le collaborateur privilégié d'Howard Hughes. Mankiewicz dut pourtant déclarer qu’aucun des personnages n’était réel. Cependant le rôle de Maria Vargas fut proposé à Rita Hayworth, elle le refusa, ne désirant pas tourner sa propre "biographie". Joseph Léo Mankiewicz (1909-1993) avait déjà une solide réputation de scénariste, producteur et metteur en scène quand il écrivit et réalisa ce film insolite, à mi-chemin de la fable, de la satire et du mélodrame. Esprit indépendant et caustique, il avait été la cheville ouvrière de films tels que Furie, de Fritz Lang, ou Trois camarades, de Frank Borzage. Son œuvre personnelle commence en 1946 avec une série de comédies brillantes et sophistiquées : L'aventure de Mme Muir (1947), Chaînes conjugales (1950), All about Eve (1950). Son art se fonde sur un fascinant jeu de miroirs entre la vérité et les apparences, entre le guêpier mondain et le miel de la sincérité, culminant dans son dernier film, Le Limier (1972). Construit sur plusieurs retours en arrière entrelacés, un peu comme Citizen Kane, ce film est une enquête sur la vraie personnalité d'une femme, victime des fastes tapageurs du show business, de la muflerie ou de l'arrivisme des hommes, et de sa propre frivolité. Citations « J’ai essayé déclara Mankiewicz, à propos
du film, de faire un conte de fées qui corresponde à la vie d’aujourd’hui, une
version amère de Cendrillon. Le prince charmant aurait dû, à la fin, se révéler
homosexuel, mais je ne voulais pas aller aussi loin. »
« Certaines scènes de La Comtesse aux pieds nus ont été pour moi les expériences
les plus merveilleuses de ma vie professionnelle, celle en particulier où je devais
danser une espèce de flamenco, vêtue d’un pull moulant et d’une jupe en satin
ordinaire, aguichant mon cavalier, l’attirant plus près de moi, me dérobant à
son étreinte, me servant de mon corps pour le tourner en ridicule. « On n’oubliera pas de sitôt (…) le chant passionné de La Comtesse
aux pieds nus, éblouissant film sphinx aux mille facettes, combat désespéré d’une
héroïne à l’inutile splendeur contre un monde sordide… »
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