Les pages de Ciné-Passion . . .

Ces pages sont rédigées par et pour des passionnés du cinéma.
Pour nous joindre, déposer vos questions ou remarques: Ciné-Passion

Aventures en Birmanie (Objective, Burma !) film américain de Raoul Walsh en 1945

Distribution:

  • Errol Flynn : Capitaine Nelson
  • James Brown : Sergent Treacy
  • William Prince : Lieutenant Jacobs
  • George Tobias : Caporal Gabby Gordon
  • Henry Hull : Mark Williams (correspondant de guerre American News)
  • Warner Anderson : Colonel J. Carter
  • John Alvin : Hogan
  • Mark Stevens : Lieutenant Barker
  • Richard Erdman : Soldat Nebraska Hooper
  • Tony Caruso : Miggliori

Fiche technique:

  • Titre original : Objective, Burma !
  • Réalisation : Raoul Walsh
  • Scénario : Alvah Bessie, Ranald MacDougall, Lester Cole
  • Production : Jerry Wald, Jack Warner
  • Société de production : Warner Bros. Pictures
  • Musique : Franz Waxman
  • Photographie : James Wong Howe
  • Montage : George Amy
  • Durée : 142 min
  • Format : Noir et Blanc ; Son : Mono
  • Dates de sortie : États-Unis : 26 janvier 1945
    • France : 28 novembre 1945

Le film évoque un des épisodes de la Seconde Guerre mondiale, les Japonais ont chassé de Birmanie les Américains et les Chinois. Mais déjà, les Américains veulent la reconquérir. Le capitaine Nelson et un petit groupe de commandos sont chargés de détruire une station de radar japonaise en territoire ennemi. Un correspondant de guerre, Mark Williams, les accompagne. Parachutés dans la jungle, ils atteignent l'objectif : la station-radar est détruite. Mais les Japonais sont à leurs trousses : l'avion qui venait les reprendre ne peut se poser. Un nouveau rendez-vous est donné. Une longue marche dans la jungle commence.

Le commando se sépare en deux groupes : le groupe commandé par le lieutenant Jacobs tombe dans une embuscade. Nelson et ses hommes découvrent leurs corps atrocement mutilés dans un village indigène. Les Japonais surviennent, la longue fuite dans la jungle recommence. N'ayant plus de radio, ils ne peuvent plus prendre contact avec les avions qui les recherchent. Ils continuent vers le nord, les hommes sont épuisés. Williams perd peu à peu la raison : la marche forcée représente plus de 300 km. Ils parviennent enfin sur une colline, au rendez-vous fixé. La nuit, les Japonais donnent l'assaut. L'attaque est repoussée. Au petit matin, des avions américains apparaissent dans le ciel. Des parachutistes sautent, les Américains ont entrepris la reconquête de la Birmanie. Mission accomplie pour Nelson et les onze survivants de cette odyssée.

Ce film vaut surtout pour la qualité de ses scènes de combat, largement supérieure à celle de bien des productions contemporaines tournées entièrement en studio. Le scénario n'est pas teinté par le politiquement correct qui guidera bien des réalisations ultérieures. À titre d'exemple, les exactions de l'armée impériale japonaise sont mises en exergue maisles GI's se réfèrent aux soldats japonais en les surnommant «monkeys» (singes). Mais la composition entièrement à la gloire des États-Unis lui a valu d'être interdit au Royaume-Uni, comme ne respectant pas la proportion de la vérité historique, puisque ce sont principalement des soldats indiens et britanniques qui ont participé à la campagne de Birmanie dans le centre et le sud du pays et des Chinois dans le nord.

La première partie du film fonctionne de manière fluide. Le réalisateur présente la mission, les lieux et les hommes composant le commando envoyé. Puis, très rapidement, on est au cœur de l’action, en Birmanie, enfoncé jusqu’à la tête dans la végétation dense et humide. La sensation de réalisme se fait immédiatement ressentir, avec ces gouttes de sueur perlant le long des visages, les militaires connaissant leur travail et sachant se mouvoir dans cet univers inhospitalier. Mais jusque-là, rien ne fait rempart. La mission suit son cours et la station-radar à détruire est prestement atteinte.

Ensuite, la seconde partie commence, plus angoissante et permettant au film de prendre enfin toute sa mesure. La fuite du commando, lente et douloureuse, et dont le sauvetage est constamment repoussé, met les nerfs du spectateur à rude épreuve. La technique de Walsh consiste alors en l'illustration d'une saisissante descente en enfer. Un enfer vert, donnant l’impression de se refermer de plus en plus sur chacun des hommes du petit groupe qui se réduit au fur et à mesure du récit. Le savoir-faire et l’audace des débuts laissent alors place à l’inquiétude, à la course pour la vie, au désespoir.

Tout au long du film, la mise en scène de Walsh est réglée au millimètre, rien ne lui échappe, tout est une question de mouvements, de panoramiques, d’évolution au travers de la végétation. Sa caméra rase le sol, s’accroche auprès des visages, infiltre l’action pour ne jamais s’en départir. La photographie est au diapason de son travail, permettant de recréer une atmosphère étouffante.

L’une des grandes forces de Raoul Walsh est également de savoir filmer les visages, parfois longuement, parfois l’espace d’une seconde. Il sait capter l’humanité de ces soldats américains, préserver la férocité des Japonais, qui ne sont absolument pas vus comme étant stupides, mais seulement très dangereux au combat, et par ce biais réaliser une aventure humaine très intense, quoiqu’unilatérale dans sa vision du conflit. Il faut souligner qu'au moment du tournage le conflit n'est pas encore terminé. Certains personnages sont très attachants notamment ce journaliste peu à peu ébranlé et rendu fou par ce qu’il observe.

La distribution est remarquable, offrant à chacun des acteurs des rôles sur mesure qu’ils assument avec brio. Dans ce film entièrement composé d’hommes, on note l’interprétation de James Brown, William Prince, George Tobias, ou encore Henry Hull, incontournable second rôle décidemment excellent dans les films auxquels il participe à cette époque. Errol Flynn est quant à lui époustouflant de naturel, dans ce qui restera l’un de ses plus grands rôles. Il suffit d’admirer le plan en contre-jour réalisé sur son visage regardant le cadavre de son ami venant de mourir, et où les larmes se mêlent à la sueur, pour se rendre compte de la parfaite symbiose qui unit le réalisateur à son acteur.

Faisant preuve d’une sensibilité et d’une virtuosité rares, Raoul Walsh a réalisé un film unique, retraçant la guerre avec une profondeur rare. Avec Aventures en Birmanie Raoul Walsh renouvele la vision de la guerre au cinéma en réalisant une œuvre unique, étrangement poétique et pourtant puissante et dévastatrice.

Ciné-Passion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Sommaire