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Avatar film américain de James Cameron, sorti en 2009

Distribution:

  • Sam Worthington (VF : Adrien Antoine) : Jake Sully
  • Zoe Saldana (VF : Ingrid Donnadieu) : Neytiri
  • Sigourney Weaver (VF : Sylvie Genty) : Dr. Grace Augustine
  • Stephen Lang (VF : Jean-Bernard Guillard) : le colonel Miles Quaritch
  • Michelle Rodriguez (VF : Géraldine Asselin): Trudy Chacon (pilote d'hélicoptère)
  • Giovanni Ribisi (VF : Damien Witecka) : Parker Selfridge (administrateur général)
  • Joel Moore : Norman Spellman
  • Wes Studi : Eytukan
  • CCH Pounder : Moat
  • Laz Alonso (VF : Bruno Choël) : Tsu'Tey

Fiche technique:

  • Titre original : Avatar
  • Réalisation : James Cameron
  • Scénario James Cameron
  • Assistant réalisateur : Josh McLaglen
  • Directeur des effets visuels : Kevin McTurk
  • Musique originale James Horner
  • Direction musicale James Horner
  • Chorégraphie Terry Notary
  • Direction artistique Kevin Ishioka , Kim Sinclair
  • Photographie Vince Pace
  • Montage John Refoua, Stephen E. Rivkin
  • Animation Miguel A. Fuertes
  • Production James Cameron, Jon Landau, Josh McLaglen, Colin Wilson
  • Société de production 20th Century Fox
  • Durée 161 minutes (2 h 41)
    • 189 minutes (3 h 09) : version longue
  • Dates de sortie France 16 décembre 2009
    • États-Unis 18 décembre 2009

En 2154, Jake Sully, ancien marine, paraplégique, accepte de participer au programme Avatar, pour remplacer son défunt frère jumeau. Il est envoyé sur Pandora, une exoplanète couverte de jungle luxuriante, en orbite dans le système stellaire d'Alpha Centauri à 4,4 années-lumière de notre système solaire. Pandora est peuplée de formes de vie incroyables, aussi magnifiques que terrifiantes, et est habitée par les Na'vi, une espèce indigène humanoïde plus ou moins hostile et considérée comme primitive par les Terriens. Ils peuvent atteindre 3 mètres de haut, ont une peau bleue et une queue, et vivent en harmonie avec leur environnement.

Lorsque les humains arrivent sur la planète où l'air leur est irrespirable sans l'aide d'un masque, ils découvrent un minerai jusqu'alors inconnu dans le système solaire, l'unobtainium, qui est la clé pour résoudre la crise énergétique sur Terre. Comme le plus gros gisement se situe dans le sous-sol d'un clan Na'vi, les Omaticayas, les Terriens décident de créer le programme Avatar, un programme diplomatique, pour gagner la confiance des Na'vi et déplacer leur peuple, afin d'extraire le minerai.

Jake Sully est recruté pour faire partie de l'expérience Avatar car il possède le même génome que son frère jumeau, scientifique destiné au programme mais décédé. Les « avatars » sont des êtres génétiquement créés possédant un corps Na'vi et un cerveau humain, contrôlable à distance par un humain grâce à des machines. Jake prend le contrôle d'un Avatar, ce qui lui permet, en plus de respirer librement, de pouvoir marcher à nouveau. Il est ensuite envoyé dans la jungle comme éclaireur, où il découvre les multiples beautés et dangers de Pandora. Il y rencontre une jeune femme Na'vi nommée Neytiri, princesse de son clan, dont la beauté n'a d'égale que la force, et qui l'emmène au sein de son clan.

Durant les trois mois de la mission, il s'intègre de plus en plus aux Omaticayas : il apprend les coutumes du peuple, et rapporte tous ses apprentissages au chef de la sécurité pandorienne et chef militaire de la mission Avatar, le colonel Quaritch. Mais ayant appris à vivre comme un Na'vi en domptant son Ikran, en apprenant à chasser, il est considéré comme faisant partie des Omaticayas et s'accouple devant Eywa (divinité Na'vi) avec Neytiri. Mais, le lendemain, Quaritch et Parker, le chef civil du programme, envoient les bulldozers. Jake se battant avec les Omaticayas, est considéré comme ennemi par Quaritch. Il est aussi considéré comme ennemi par les Omaticayas pour être en réalité un humain.

Peu après, Quaritch détruit l'Arbre Maison, lieu où vivent les Omaticayas, et leur chef est tué. Jake revient vers le peuple dont il fait maintenant partie après avoir dompté l'un des monstres de Pandora pour se faire entendre, puis il fédère une quinzaine de clans, après avoir pris soin d'emmener son vrai corps le plus loin possible du campement militaire. Mais Quaritch voyant d'importants mouvements de troupe de la part des Na'vis, il monte une attaque d'importante envergure contre eux avec pour but : détruire le plus grand lieu de recueillement auprès d'Eywa. Les Na'vis, dirigés par Jake Sully, Norman (un ami de Jake) et Tsutey, nouveau chef des Omaticayas, vont alors entrer en guerre contre les humains. Gagnant au début grâce à l'effet de surprise, ils sont ensuite écrasés par la puissance des armes terriennes. Ce n'est qu'à la fin que des milliers d'animaux envoyés par Eywa détruisent définitivement les troupes de Quaritch, lui-même tué alors qu'il essayait de tuer le vrai corps de Jake.

Lors des dernières scènes, les terriens quittent la planète, et les Na'vis réussissent à faire passer définitivement l'esprit du héros dans le corps de son Avatar.

Analyse critique

James Cameron est un bon technicien du cinéma, capable de produire une science-fiction efficace, chargée d’un message sans grande sophistication apparente, mais souvent bien plus engagé politiquement qu’on ne pourrait le supposer au premier abord. On peut être rebuté par le kitsch qui se niche dans certains détails ou par le goût de l’épate technique, même s’il faut reconnaître à James Cameron qu’il prend soin d’inventer les effets spéciaux que réclament ses scénarios plutôt que d’adapter son scénario aux derniers effets à la mode, comme le font nombre d’autres cinéastes.

Beaucoup de commentateurs ont critiqué Avatar en faisant remarquer que son scénario était simpliste. C’est le cas, mais est-ce vraiment un défaut ? Dans une des premières scènes du film, on voit Jake Sully, le héros, utiliser le grand corps bleu athlétique de l’espèce Na’avi qui est mis à sa disposition en remplacement de son corps d’humain handicapé. Il court, il jouit de chaque sensation de ce corps et dès cet instant l’affaire est entendue : malgré les ordres qui lui sont donnés, et qu’il accepte avec détachement, il se retournera évidemment contre la mesquinerie belliqueuse de ses congénères humains.

Les influences de James Cameron semblent innombrables. Il s’est ostensiblement inspiré de sources japonaises telles que les films de Miyazaki (Princesse Mononoke, sur lequel, mutatis mutandis, Avatar semble presque décalqué ; Le Château dans le ciel pour ses terres aérolithes elles-mêmes empruntées à Swift. Cette histoire de civilisé-naïf qui découvre qu’il est plus barbare que les sauvages qui l’accueillent n’a pas besoin d’être développé par le scénario puisqu’il s’agit d’un cliché maintes fois rebattu depuis le XVIIIe siècle : des Houyhnhnms du quatrième voyage de Gulliver et de Tristes tropiques à Pocahontas en passant par Little Big Man, La Forêt d’émeraude et bien sûr Danse avec les loups, nous sommes en terrain bien balisé.

Le poncif n’est ici jamais contourné, il n’est assorti d’aucune ombre, d’aucune forme de surprise, les gentils sont gentils, les méchants sont méchants et on nous sert par le menu toutes les situations les plus attendues dans ce genre de récit : la fille du chef qui tombe amoureuse du bel étranger, l’animal mythologique qu’il faut dompter, on pense au ver des sable de Dune ou aux Mustangs des récits de blancs parmi les indiens, et autres rites iniatiques servant à gagner l’estime de la tribu, le gentil américain qui devient un leader des indigènes Na’avi et qui semble désigné par une prophétie et jusqu’à Sigourney Weaver qui reprend sans grand changement le rôle de scientifique soucieuse de protéger son objet d’étude de Gorilles dans la brume.

Sans surprise, les principaux acteurs qui interprètent les Na’avi sont noirs ou amérindiens, preuve évidente qu’il y a là l’expression de la culpabilité de l’homme blanc face à quelques uns de ses démons historiques comme les guerres indiennes, la colonisation ou la ségrégation raciale. Cependant certains détails prouvent que James Cameron ne se lamente pas hypocritement sur un passé irréparable, mais qu’il parle aussi et sans doute surtout de l’actuelle action géopolitique américaine et du complexe militaro-industriel qui en est le principal outil. Le paradis perdu des jungles amérindiennes ou africaines du passé n’est ici qu’un prétexte à nous parler des conflits très actuels qui entourent la question du contrôle des matières premières. Tout cela baigne dans un new-age de bon aloi : la nature est harmonieuse et capable de penser, les Na’avi communient avec leurs ancêtres et disent une petite prière pour les animaux qu’ils chassent.

Thématiquement, Avatar ne contient donc sans doute pas la moindre idée originale. Son propos est de fournir un récit simple et épique comme l’étaient les meilleurs films de la série Star Wars. James Cameron ressasse dans Avatar une une de ses obsessions récurrentes, à savoir son point de vue sur le rapport entre l’homme et la technologie. Apprenti sorcier, l’homme utilise ses machines, ses véhicules et ses armes pour palier à sa faiblesse physique, mais plus encore pour éviter de se poser des questions sur ses faiblesses morales telles que l’orgueil, l’égoïsme et l’avidité. Une scène symbolique de ce fait est celle où le colonel qui commande aux Marines se bat au corps à corps, si l’on peut dire puisqu’aucun des deux combattants n’utilise directement son propre organisme, contre le héros : il le fait en utilisant un mecha, exo-squelette robotique, et à l’aide d’un couteau de combat géant : les technologies de pointe et le progrès scientifique sont mis ici au service de la plus vile barbarie. C’était le sujet de Aliens, de Abyss, de l’excellente série Dark Angel, mais aussi de Titanic.

La manière dont une équipe de chercheurs désintéressés est instrumentalisée par les militaires et les financiers de l’opération est tout aussi typique de Cameron. Cette question du rapport à la technologie est d’autant plus intéressante que James Cameron, scientifique de formation et fils d’ingénieur, est un cinéaste obsédé par la science et la technologie, qu’il met au service de ses réalisations. En creux, l’auteur parle de la terre, de ce qu’elle est devenue en 2154. Il nous dit qu’elle n’a pas beaucoup changé, qu’elle n’a pas pas progressé, qu’elle est juste plus puissante que jamais mais que cette puissance ne se fait au profit d’aucun projet positif ou humain au sens philosophique et moral du terme : on continue à envoyer des marines aux quatre coins du monde et même de l’univers pour défendre les intérêts de pools d’actionnaires de sociétés privées. L’auto-destruction semble une évidence.

La vraie réussite du film est esthétique : la forêt de la lune Pandora est somptueuse. Sa flore et sa faune sont définies avec un grand soin et mélangent les jungles terrestres avec les grands fonds marins. En la matière, tout a déjà été inventé par la science-fiction depuis l’entre deux guerres au moins : la peau bleue, les animaux à six pattes, etc. Ce n’est pas par son inventivité que Cameron peut nous étonner, c’est par la qualité de l’intégration de sa 3D informatique. L’effet aurait sans doute été affreux s’il n’avait pas été obtenu avec talent : les expressions des visages ou les mouvements des corps ne constituent jamais une gène et, au contraire, sont ce qui fait fonctionner l’ensemble. C’est avant tout la qualité de l’animation qui fait la qualité du film. Je m’en rends particulièrement compte en regardant les visuels que j’intègre au présent article : ces images fixes ne donnent aucune idée du film.

Avatar a englouti un budget pharaonique, on estime qu’il a dépassé, en dollars constants, les records du Cléopâtre de Mankiewicz (1963) ou de Titanic (1997), mais s’il y a bien une chose que l’on peut reconnaître avec James Cameron, c’est qu’il ne jette pas l’argent par les fenêtres et qu’il sait fabriquer du grand spectacle. À aucun moment le spectateur ne s’extrait du récit à cause d’une image trop ou au contraire trop peu travaillée et aucun effet visuel n’a besoin de justifier sa présence.

Subir un corps ou être un corps, telle est en somme la question. On comprend facilement pourquoi Jake Sully, ex-marine cloué sur un fauteuil roulant, devient accro à son avatar : il fusionne alors avec la nature, la flore phosphorescente, les oiseaux. Une forme d’harmonie, à la fois immémoriale et sophistiquée, règne sur la planète Pandora, illustrée avec une certaine grâce. C’est rare de percevoir dans un blockbuster un constat aussi négatif sur l’état de la civilisation américaine. Les Terriens ne sont pas seulement impérialistes, cupides et cyniques, ils semblent surtout arriérés, lourds dans leurs corps comme dans leur prétendue haute technologie. Entre ces cow-boys et ces Indiens d’un nouveau genre, l’avenir appartient aux seconds.

 

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