Les pages de Ciné-Passion . . .

• James Woods : M. Lisbon
• Kathleen Turner : Mme Lisbon
• Kirsten Dunst : Lux Lisbon
• Josh Hartnett : Trip Fontaine
• Michael Paré : Trip Fontaine adulte
• Scott Glenn : père Moody
• Danny DeVito : Dr Horniker
• A.J. Cook : Mary Lisbon
• Hanna R. Hall : Cecilia Lisbon
• Leslie Hayman : Therese Lisbon
• Chelse Swain : Bonnie Lisbon
• Jonathan Tucker : Tim Weiner
• Anthony DeSimone : Chase
• Giovanni Ribisi : Narrateur
• Robert Schwartzman : Paul Baldino

Dans une Amérique puritaine des années soixante dix, une famille avec cinq filles va se déchirer. Tout commence par la tentative de suicide d'une des sœurs. La situation de ces jeunes adolescentes en mal de vivre est vue à travers les garçons de leur voisinage et de leur université qui les convoitent. Ceux-ci vont tenter de les libérer du carcan familial, mais, en allant trop loin, ce qui provoque un resserrement de l'étreinte du père, et les filles sont punies. Enfermées chez elle par leurs parents, elles décident alors de se suicider, au grand étonnement des jeunes garçons.

L'émotion du film est soutenue par une superbe bande originale de Air, le célèbre groupe de musique électronique français. Cependant, une seconde bande originale a été commercialisée en 2004 (2000 pour celle de Air). Elle n'est pas dédiée au seul groupe Air.

Dès le début, Sofia Coppola brise le suspense : les cinq sœurs de la famille Lisbon se suicideront. L'intérêt du film se trouve ailleurs, dans la reconstitution d'une époque et de son atmosphère vue par des garçons qui racontent en voix off le drame auquel ils ont assisté. Ces adolescents font revivre grâce à leurs souvenirs les 5 soeurs qu'ils observaient, admiraient en secret comme des déesses inaccessibles dont la mort marque la fin d'une époque, celle des rêves et des désirs pour les entraîner dans un monde plus cynique qu'ils décrivent dans les dernières minutes du film.

Virgin Suicides est organisé comme un cahier de souvenirs que l'on feuillette pour s'arrêter de temps à autre sur des photos, des moments pris sur le vif comme dans un rêve. Il ne manquera pas de susciter de la nostalgie pour ceux qui ont vécu cette vie, porter ces vêtements, écouter cette musique, aimé des filles inaccessibles et pourtant si proches. La plus grande réussite du film de Sofia Coppola est l'atmosphère qu'il dégage, à la mise en scène éthérée parsemée de couleurs pastel, comportant des séquences sublimées par les narrateurs comme celle des soeurs prises en photo dans un champ de fleurs. Le fait que l'histoire soit racontée par les adolescents impose une distance par rapport au sujet, n'explicitant pas clairement les causes du suicide des soeurs Lisbonn.

C'est cette incertitude qui rend le film plus subtil, la réalisatrice, refusant la facilité, nous interroge : "pourquoi se sont-elles suicidées ?" Seules quelques pistes nous sont suggérées sans apporter de solutions définitives, ce qui a pour effet d'accroître le mystère qui entoure les soeurs Certaines critiques ont affirmé que le suicide était dû uniquement à l'intégrisme chrétien de la mère qui élève ses enfants avec des règles strictement religieuses, le film constituant alors un pamphlet contre cet intégrisme. Mais cette vision est contestable, nous sommes face à des parents, chrétiens certes, mais aussi désemparés, ne sachant pas comment réagir à la tentative de suicide de Cécilia, balançant d'une attitude à l'autre sans savoir que faire.

D'abord attentionnés puis très autoritaires jusqu'à cloîtrer leurs filles, les parents n'arrivent pas à communiquer avec leurs enfants, en particulier à propos de la tentative de suicide de la plus jeune, ajoutant une barrière de plus avec le monde extérieur. Le père est joué par James Wood dans un contre-emploi, loin des habituelles psychopathes, où il apparaît complètement déconnecté de la réalité, intéressé seulement par ses maquettes d'avions et par ses plantes.

Mais le film ne se résume pas à un drame. Il contient de nombreux moments drôles et attendrissants pouvant faire écho à nos propres souvenirs, comme dans la scène du bal des lycéens ou dans celle décrivant les amours d'un jeune italien frimeur. On pourrait reprocher au film quelques effets faciles et inutiles, tels que la confession de Trip devant la caméra quelques années plus tard ou l'intrusion, difficilement compréhensible, des chaînes de télévisions dans la vie des Lisbonn, mais l'ensemble reste complètement séduisant.